La campagne de commercialisation de l’anacarde a démarré timidement en Casamance. À Ziguinchor, les acteurs se mobilisent pour assurer son succès, notamment en ce qui concerne le transport des noix vers Dakar. Ce maillon clé suscite des débats, après les controverses de l’année précédente sur le transit des noix depuis Ziguinchor. Voie terrestre ou maritime : quels sont les enjeux ? Les membres du Cadre régional de concertation sur la filière anacarde de Ziguinchor livrent leurs analyses.
L’interdiction d’exporter les noix par voie terrestre, instaurée en 2018, a suscité la révolte de nombreux acteurs privilégiant cette option. Selon Demba Diémé, président du Cadre de concertation régionale (CCR), ce débat n’aurait pas dû exister. « Le transport est une activité libérale. Chacun devrait pouvoir choisir le mode qui lui convient. Pour développer le port de Ziguinchor et soutenir la population, nous privilégions la voie maritime. Mais face aux problèmes d’organisation, comme le manque de navires ou les coûts élevés, les opérateurs sont libres d’utiliser la voie terrestre », explique-t-il. Suite aux demandes des acteurs, l’État a autorisé le transport terrestre.
La voie maritime jugée trop coûteuse
Les acteurs estiment que le transport terrestre est deux à trois fois moins cher que la voie maritime. Selon Demba Diémé, « le coût du transport maritime de Ziguinchor à Dakar est parfois plus élevé que celui de Dakar vers l’étranger, ce qui est paradoxal ». Le transport terrestre, plus rapide, permet de charger les conteneurs et d’atteindre Dakar en deux jours, offrant un retour de fonds rapide. « Avec le bateau, les délais et les coûts freinent les opérateurs », ajoute-t-il.
Aboubacar Camara, vice-président du CCR, qui a défendu la voie maritime, souligne que « le port de Ziguinchor ne tire aucun bénéfice de la campagne, malgré le volume de noix acheminées à Dakar ». Il insiste sur la nécessité de rendre la voie maritime compétitive en réduisant les coûts et en réglant les problèmes logistiques. Cependant, il reconnaît que les taxes et les prix actuels rendent la voie terrestre plus attractive.
La voie maritime, plus sûre mais moins pratique
Demba Diémé et Aboubacar Camara s’accordent sur la sécurité accrue de la voie maritime. « Elle est plus sûre, à condition que les prix baissent et que la capacité des navires réponde à la demande », précise M. Diémé. Un bateau transportant seulement 20 conteneurs, alors qu’un opérateur en a réservé 100, oblige ce dernier à attendre, ce qui ralentit ses activités. Camara ajoute que le transport terrestre, bien que plus économique, endommage les routes avec des camions lourds de 50 à 60 tonnes.
Pour une compétitivité du port de Ziguinchor
Le port de Ziguinchor profite peu de la campagne de l’anacarde. Aboubacar Camara explique que des concertations ont été menées au sein du CCR pour promouvoir la voie maritime. « Nous avons collaboré avec les transporteurs et les manœuvres pour privilégier l’exportation par bateau », indique-t-il. Cependant, une coordination efficace entre exportateurs, armateurs, Dubaï Port et le Port autonome de Dakar est essentielle. Selon Camara, Dubaï Port, qui favorise la voie terrestre et maintient des prix élevés, freine la compétitivité du port. « Lors de la dernière campagne, cette société a refusé de revoir ses tarifs pour encourager le transport maritime », déplore-t-il.
Vers une coexistence des deux voies
Les acteurs plaident pour une coexistence des voies terrestre et maritime afin de dynamiser la filière et de répondre aux besoins de tous. Ils appellent à une équité dans les conditions d’exportation, permettant à chaque opérateur de choisir le mode de transport le plus adapté. Cette flexibilité, combinée à des efforts pour rendre le port de Ziguinchor plus compétitif, pourrait renforcer la chaîne de valeur de l’anacarde en Casamance.