Massacre de Thiaroye : 81 ans après, le Sénégal exige la « vérité »

Le Sénégal commémore ce lundi 1er décembre 2025 le 81e anniversaire du massacre de Thiaroye (1944), un événement tragique érigé en « devoir de mémoire » national. Sous la présidence du Chef de l’État, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, la journée est placée sous le signe du « recueillement » et, surtout, de la « réclamation de la vérité historique ».

La commémoration débutera par le traditionnel dépôt de gerbes au cimetière militaire de Thiaroye, suivi de la cérémonie officielle prévue au Camp. L’objectif est d’honorer le sacrifice et la dignité des Tirailleurs et faire la lumière sur l’un des chapitres les plus sombres de l’histoire coloniale.
 
Ces soldats africains venaient de 17 nations différentes dont le Bénin, le Mali, la Côte d’Ivoire, le Sénégal, et le Tchad et avaient joué un rôle crucial dans la libération de la France durant la Seconde Guerre mondiale. Le 1er décembre 1944, alors qu’ils réclamaient le paiement de leurs dus, ils furent massacrés à l’aube. L’ampleur exacte du drame reste un point de contentieux.
 
Le Président Faye, qui a fait de ce combat mémoriel un axe fort de sa politique depuis son élection, a renouvelé sa demande à Paris. « La vérité historique ne se décrète pas, elle se découvre excavation après excavation, jusqu’à la dernière pierre soulevée », avait-il martelé le 16 octobre 2025, lors de la réception du Livre blanc sur le massacre de Thiaroye. Le Sénégal attend toujours la déclassification totale des archives françaises de l’époque pour mettre fin aux zones d’ombre.
 
Inscrite comme « activité phare » de l’agenda national, la commémoration du 1er décembre s’accompagne d’une politique mémorielle ambitieuse, détaillée par le président en Conseil des ministres du 19 novembre 2025. Le Chef de l’État a instruit le gouvernement de rendre le Musée relatif aux évènements de Thiaroye pleinement fonctionnel.
 
Par ailleurs, le travail scientifique et archéologique se poursuit pour « rétablir la vérité sur cet évènement historique douloureux ».
La création d’un Mémorial à Thiaroye, d’un centre de documentation et l’enseignement de cet épisode dans les écoles sénégalaises sont en cours.
 
Toujours en Conseil de ministre mercredi dernier, le Premier ministre, Ousmane Sonko a souligné que l’enjeu est autant culturel que civique. « Le pari du développement dépend de la qualité du capital humain et de son civisme, défini comme l’ensemble des attitudes et comportements qui permettent le bon fonctionnement de la société ».
 
« Les conclusions préliminaires des fouilles archéologiques menées par la sous-commission dédiée sont accablantes et jettent une nouvelle lumière sur les événements de 1944, contredisant la version officielle coloniale », lit-on sur le dossier de presse.
 
« Les tombes ne sont pas des cénotaphes. Des corps sont bien enterrés, mais les tombes visibles ne correspondent pas aux lieux réels d’inhumation. Les incohérences suggèrent deux hypothèses majeures, soit l’existence d’une fosse commune dissimulée sous 34 tombes factices, soit une mise en scène coloniale visant à faire correspondre le nombre de sépultures aux « 34 victimes officielles » annoncées à l’époque ».
 
« Les restes montrent des dommages lourds et des pratiques d’enterrement multiples, suggérant plusieurs formes de mort ou de massacres. Certains corps portaient des insignes militaires, l’un a été retrouvé enchaîné, un autre sans crâne, indiquant des violences inouïes », souligne le document.
 
À Thiaroye, « les noms se sont tus, mais leur combat parle encore. Tant que cette mémoire vivra, aucune balle ne pourra tuer leur dignité », a conclu la Présidence. Cette commémoration réitère l’engagement du Sénégal à obtenir la pleine reconnaissance de ce pan d’histoire.

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