Israël mûrit sa riposte à l’Iran, Washington opte pour des sanctions contre Téhéran

Israël veut faire payer à l’Iran le prix de son attaque sans précédent contre le territoire israélien, malgré les appels internationaux à la retenue, y compris de la part de son allié américain, qui a annoncé de nouvelles sanctions contre la République islamique.
 
A Téhéran, le président Ebrahim Raïssi a prévenu mardi que « la moindre action » d’Israël contre « les intérêts de l’Iran » provoquerait « une réponse sévère, étendue et douloureuse » de son pays, dans une région déjà sous tension avec la guerre dans la bande de Gaza où les bombardements se sont poursuivis dans la nuit.
 
Dans ce contexte, le Conseil de sécurité de l’ONU doit se prononcer jeudi sur une demande des Palestiniens de devenir un Etat membre à part entière des Nations unies, ont annoncé dans la nuit plusieurs sources diplomatiques.
 
L’Autorité palestinienne a relancé début avril une procédure initiée en 2011, mais qui n’avait pas pu prospérer en raison de l’opposition des Etats-Unis.
 
Le groupe arabe a publié mardi soir une déclaration affirmant son « soutien sans faille » à la requête palestinienne, mais celle-ci apparaît à nouveau vouée à se heurter au veto américain.
 
Douze jours après une frappe meurtrière contre son consulat à Damas le 1er avril, imputée à Israël, l’Iran a lancé samedi soir une attaque de drones et de missiles contre le territoire israélien, la première jamais menée à partir du sol iranien.
 
La quasi-totalité des 350 engins ont été interceptés avec l’aide des Etats-Unis et d’autres pays alliés, a affirmé Israël qui a fait état de blessés.
 
« Nous ne pouvons pas rester les bras croisés face à une telle agression, l’Iran ne sortira pas indemne » après son attaque, a affirmé le porte-parole de l’armée Daniel Hagari. « Nous répondrons au moment, au lieu et à la manière que nous choisirons ».
 
Juste après son attaque, l’Iran a affirmé avoir agi « en exerçant son droit à l’autodéfense » à la suite de la frappe qui a détruit son consulat à Damas et coûté la vie notamment à deux hauts gradés iraniens, et a dit considérer « l’affaire close ».
 
L’armée israélienne a affirmé que les victimes de la frappe dans la capitale syrienne étaient des « terroristes » agissant contre Israël, sans confirmer ou non son implication.
 
– Nouvelles sanctions –
 
Les Etats-Unis, alliés indéfectibles d’Israël, ont vite fait savoir qu’ils ne voulaient pas « d’une guerre étendue avec l’Iran » et qu’ils ne participeraient pas à une riposte israélienne, Washington préférant plutôt renforcer ses sanctions contre Téhéran, a annoncé mardi soir la Maison Blanche.
 
« Dans les prochains jours, les Etats-Unis vont imposer de nouvelles sanctions visant l’Iran, dont ses programmes de drones et missiles », son corps des Gardiens de la révolution et son ministère de la Défense, a détaillé Jake Sullivan, le conseiller à la sécurité nationale du président Joe Biden.
 
Ces nouvelles sanctions vont « poursuivre la pression continue exercée sur l’Iran afin d’endiguer et de détériorer ses capacités militaires », a ajouté M. Sullivan, précisant que les Etats-Unis s’attendaient à voir ses alliés emboîter le pas.
 
L’Union européenne envisage d’élargir le champ de ses sanctions déjà en place contre l’Iran, a déclaré mardi le chef de la diplomatie de l’UE Josep Borrell. L’idée serait  par exemple d’élargir à d’autres types d’armement, comme les missiles, les sanctions déjà adoptées pour interdire l’exportation de l’UE vers l’Iran de composants utilisés dans la fabrication de drones.
 
La ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock, attendue mercredi en Israël, a plaidé mardi pour de nouvelles sanctions de l’UE après l’attaque iranienne.
 
Après avoir obtenu le soutien de plusieurs alliés dans l’interception des missiles, Benjamin Netanyahu avait appelé la communauté internationale à « rester unie » face à « l’agression iranienne, qui menace la paix mondiale ».
 
Prenant le contrepied des Occidentaux qui ont condamné l’attaque iranienne du week-end, le président turc Recep Tayyip Erdogan a accusé M. Netanyahu d’en être « le principal responsable ». La frappe sur le consulat iranien a été « la goutte d’eau qui a fait déborder le vase », a-t-il dit.
 
– « Nous sommes épuisés » –
 
L’Iran s’était gardé jusqu’à présent d’attaquer Israël frontalement et l’affrontait via ses alliés les rebelles yéménites Houthis –dont deux drones lancés depuis le Yémen ont encore été interceptés mardi par l’armée américaine selon le Pentagone– ou le Hezbollah libanais.
 
Ce mouvement chiite a revendiqué mardi une attaque aux drones explosifs lancés depuis le Liban sur des positions israéliennes, puis annoncé la mort de trois de ses membres dans des frappes israéliennes. L’armée israélienne a confirmé avoir tué dans des frappes aériennes trois membres du Hezbollah, dont l’un à la tête d’une unité en charge des roquettes et des missiles.
 
Les affrontements à la frontière libano-israélienne sont quasi quotidiens depuis le début, il y a plus de six mois, de la guerre entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas, membre comme le Hezbollah de « l’axe de la résistance », un regroupement de mouvements armés soutenus par l’Iran et hostiles à l’Etat hébreu.
 
La guerre a été déclenchée par une attaque sans précédent menée le 7 octobre par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d’Israël, qui a fait 1.170 morts, en majorité des civils, selon un bilan de l’AFP établi à partir de données officielles israéliennes. Plus de 250 personnes ont été enlevées et 129 restent retenues à Gaza dont 34 sont mortes d’après des responsables israéliens.
 
En représailles, Israël a juré de détruire le Hamas, qu’il considère comme une organisation terroriste de même que les Etats-Unis et l’Union européenne, et lancé une vaste offensive qui a fait 33.843 morts, la plupart des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.
 
Outre les destructions et le lourd bilan humain, la guerre a provoqué une catastrophe humanitaire avec la plupart des 2,4 millions d’habitants menacés de famine selon l’ONU qui lance mercredi un appel aux dons de 2,8 milliards de dollars pour aider les Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza.
 
Devant une boulangerie qui vient de rouvrir dans la ville de Gaza, des Palestiniens ont fait la queue pendant des heures mardi pour acheter du pain.
 
« Nous sommes épuisés », confie sur place à l’AFP Firas Sukkar, un sac de pain à la main. « Nous avons perdu nos fils, nos filles, nos femmes. Nous avons perdu nos vies entières (…) mon seul message est d’arrêter la guerre ».

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