L’immense ambition militaire de la Pologne

Les premiers chars lourds K2 black panther sont désormais en service au sein des forces polonaises. Il y a quelques mois, Varsovie a commandé à la Corée du Sud 1 000 blindés, mais aussi 600 obusiers et près de 300 lance-roquettes multiples… Des achats colossaux qui vont aussi bénéficier à l’industrie de défense polonaise pointe Léo Périat, chercheur à l’Institut français des relations internationales (Ifri) :
 
« On aura à terme une armée polonaise qui pourrait être mieux équipée que l’armée française ne l’a jamais été, y compris pendant la guerre froide. Les Polonais vont acquérir une capacité de production très considérable. Est-ce que tous les contrats qui ont été annoncés iront jusqu’au bout – parce qu’il arrive assez souvent qu’une partie du contrat soit  »squeezée » avant la fin – ? Ça, il va falloir le suivre de très près, pour voir si, effectivement, la Pologne aura d’ici 2032-2035 la première armée d’Europe. »
 
La Pologne pourrait ainsi cumuler à terme plus de chars que les cinq premières puissances militaires d’Europe de l’Ouest. Et si Varsovie a annoncé cette année une hausse significative de ses dépenses militaires, c’est qu’elle est en première ligne face à la Russie, souligne Frédéric Mauro, chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques :
 
« La Russie a toujours été perçue par la Pologne comme étant l’ennemi héréditaire. Elle est passée du stade de menace virtuelle au stade de menace tout à fait urgente. Jusqu’à présent, le gouvernement polonais s’en remettait presque exclusivement à la protection de l’Otan. Mais là, les choses ont un petit peu changé. Les Polonais se sont quand même rendus compte de la fragilité du protectorat américain. Le deuxième changement fondamental, qui est intervenu précisément avec la guerre en Ukraine, c’est qu’une guerre conventionnelle en Europe est redevenue possible. »
 
La Pologne veut jouer parmi les grands
Varsovie redécouvre l’importance de l’autonomie stratégique et multiplie les alliances pour endosser un rôle de leader sur le flanc oriental de l’OTAN. « L’alliance avec la Lituanie est tout à fait naturelle », indique Frédéric Mauro, « de même qu’elle l’est avec la Tchéquie et avec l’Ukraine. Donc, c’est en constituant des alliances et en s’équipant elle-même que la Pologne se protège. Parmi les grands alliés potentiels, avec les Allemands, c’est vraiment compliqué. Mais il y a une alliance qui pourrait se révéler intéressante entre la Pologne et la France. Il y a des appels du pied de part et d’autre. Aujourd’hui, les Polonais se souviennent que les Français existent, et qu’en matière de défense, ils ont quelques arguments à faire valoir. Notamment, mais pas seulement, dans le domaine nucléaire. »
 
La Pologne veut désormais jouer parmi les grands et ambitionne de posséder, dans une décennie, les forces terrestres les plus puissantes d’Europe, forte de 300 000 soldats.

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