NAUFRAGE EN MER DE CHINE : Quelles conséquences pour l’environnement

La pollution générée par le naufrage d’un pétrolier, début janvier, prend de l’ampleur en mer de Chine. Le navire transportait une forme volatile d’hydrocarbures. Il s’agit du premier accident de ce type dont il est difficile d’évaluer l’impact.

Faut-il craindre une des pires pollutions maritimes de ces dernières années ? Le 6 janvier, le pétrolier iranien Sanchi a pris feu après une collision avec un navire de fret chinois, en mer de Chine, à environ 300 kilomètres à l’est de la ville de Shanghai. Il a brûlé pendant une semaine avant de couler entièrement, le 14 janvier. Le navire transportait 136 000 tonnes de condensat au moment de la collision, un hydrocarbure non-raffiné particulièrement volatile. En plus de cette cargaison, le Sanchi disposait à bord d’environ 1 000 tonnes de diesel lourd pour faire tourner ses machines.

Des images prises par satellite ont permis de détecter trois nappes s’étalant au total sur 332 km2, a indiqué dimanche 21 janvier, dans un communiqué, l’Administration nationale chinoise des océans. Une surface qui a triplé en l’espace de quatre jours, selon des chiffres du gouvernement chinois.

UNE POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE REDOUTÉE

C’est la première fois qu’un tel accident se produit. Jamais un pétrolier transportant du condensat n’avait brûlé et coulé ainsi, selon les données récoltées par le Centre de documentation, de recherche et d’expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux (Cedre), basé à Brest. D’après son directeur adjoint, Christophe Rousseau, contacté par France 24, le condensat qui s’est échappé du Sanchi est un des moins toxiques de sa catégorie dont « le spectre est assez large ». « Celui-ci à des caractéristiques proches d’une essence très légère. Il est peu soluble et très évaporant », explique ce spécialiste. Malgré tout, sa toxicité est bien réelle. « Ce n’est évidemment pas inoffensif puisque tout porte à croire que ces vapeurs sont à l’origine de la mort de l’équipage », prévient-il. Les 32 membres d’équipage ont péri, seuls trois corps carbonisés ont été retrouvés par les pompiers.

En brûlant et en s’évaporant, s’il ne pollue pas en profondeur, ce condensat va provoquer avant tout « une très grosse pollution atmosphérique », estime Christophe Rousseau. « Les conséquences sur les oiseaux pourraient être importantes. En surface, le plancton risque d’être très pollué, mais les poissons n’ont aucune raison de rester dans zone polluée et devraient s’en écarter ». La zone touchée est considérée comme importante pour la reproduction de certaines espèces de poissons, de crustacés et de calamars, selon Greenpeace. Elle se trouve aussi sur le passage de nombreux cétacés migrateurs comme la baleine grise ou la baleine à bosse.

Côté chinois, un ingénieur de l’Administration nationale des océans, Zhang Yong, cité par la télévision publique, s’est voulu confiant. « Il s’agit de brut léger, et ce type de marée noire a des conséquences bien moindres, comparé aux autres marées noires, car ce genre de pétrole est spécialement volatil. La majeure partie est partie dans l’atmosphère, alors il y a moins de conséquences pour l’océan ».

Quant au 1 000 tonnes de fuel brut, ils pourraient prochainement toucher les côtes sud-coréennes et japonaises en fonction des vents et des marées. « Une mini-marée noire »; affirme Christophe Rousseau, comparée au 30 000 tonnes déversées par l’Érika au large de la Bretagne en 1999. Techniquement, selon lui, impossible de parler de marée noire avec le condensat, le terme ne désignant qu’une pollution massive par des hydrocarbures noires.

LA MER DE CHINE, CARREFOUR STRATEGIQUE ET INCONTOURNABLE

Pour Richard Steiner, un spécialiste des marées noires installé en Alaska, le niveau de pollution de la mer de Chine est tel que le naufrage du bateau iranien ne change malheureusement guère la donne. « À chaque jour qui passe, beaucoup plus de pollution arrive en mer de Chine orientale en provenance du Yangtsé (le plus long fleuve de Chine) et des autres fleuves que ce que ne représente la marée noire du Sanchi », explique-t-il à l’AFP.

De plus, dans un rapport daté de 2017, l’Institut des relations internationales et stratégiques » (IRIS) rappelle que « deux tiers du trafic conteneurisé traverse la mer de Chine ». Un carrefour stratégique et incontournable du commerce mondial, et en particulier celui des hydrocarbures. « À plus long terme, la vraie question pour la Chine est d’arriver à nettoyer cet environnement horriblement pollué », estime Richard Steiner.

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